dimanche 12 mai 2013

La ligne bleue des Vosges


Régulièrement les politiques s'énervent sur la défense de la langue française. Récemment http://circulaires.legifrance.gouv.fr/pdf/2013/05/cir_36918.pdf
J'adore la langue française. J'écris des romans en français et en rien d'autre.
Mais, dans mon microcosme - recherche & enseignement en informatique
1) je suis pour que l'on puisse rédiger les thèses dans la langue qu'on veut et même en serbo-croate si on y tient. Au moins en anglais parce que les confs et journaux internationaux sont en anglais et que nous sommes des feignants.
2) je suis pour que l'on puisse donner des cours de master en anglais pour pouvoir attirer des étudiants serbes, croates, chinois, indiens, etc.

8 commentaires:

  1. Je sais que vous vous êtes toujours plaint de ne pas disposer de beaucoup de temps pour entretenir votre blog, merci donc d'avoir pris le temps de partager votre point de vue avec nous. J'ai quelques questions cependant.

    Dans la pratique, est-on sûr de l'effet positif du deuxième point ? Les détracteurs du projet de loi actuel citent un certain nombre de contre-exemples flagrants, où on a vu des universités ou écoles françaises désertées après qu'il a été décidé d'y donner les cours en anglais plutôt qu'en français. Quel est votre avis sur le sujet ?

    Après tout, il se pourrait très bien que cette attractivité des universités françaises parfaitement anglophones ne soit qu'un fantasme, d'autant qu'on sait assez bien (par exemple quand on est enseignant au MPRI de l'université Paris 7) que le niveau en anglais est loin d'être parfait, même pour un master international — et que les universités françaises attirent déjà des étudiants étrangers, dont un certain nombre viennent de pays francophones.

    Le premier point semble plus idéologique (ou en tout cas moins les conséquences d'un choix ou de l'autre seront moins immédiatement visibles). Cependant, que penser d'une thèse écrite en breton, ou dans une autre langue régionale ? La raison d'être des thèses n'est-elle pas avant tout de permettre au thésard de présenter son point de vue sur un sujet qu'il a eu l'occasion de travailler pendant longtemps, et qu'il est en mesure d'expliquer à des gens qui ne le connaissent pas forcément très bien. Pourquoi alors ne pas privilégier les thèses en français, pour que les plus jeunes (des élèves de licence, et peut-être même des lycéens qui auront appris l'informatique grâce à un futur enseignement obligatoire dans les collèges et lycées) puissent avoir accès à la science ?

    RépondreSupprimer
  2. Point 2. Je parle de liberté de le faire ou pas. Si ça foire, vous arrêtez. Point. Je parle aussi surtout d'attirer des étudiants en master pour garder les meilleurs en thèse. Évidemment, cela suppose aussi une montée en puissance du nombre des bourses de thèse. Mais on veut rester dans la course ou pas?

    Point 1. Je parle encore de liberté. Pour arriver à trouver un jury qui accepte une thèse en serbo-croate en informatique, ça va être chaud. Évidemment, c'est l'anglais qui est visé pour ne pas avoir à réécrire des articles déjà écrits en anglais pour des confs ou des journaux. Quand à faire lire nos thèses à des djeunes. Sérieusement ? On ne veut pas les dégouter. On pourrait plutôt encourager nos chercheurs séniors, juniors et doctorants à écrire des textes de vulgarisation. Il suffirait de décider que c'est pris en compte autant qu'autre chose pour une embauche ou une promotion.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Merci pour votre réponse.

      > Quand à faire lire nos thèses à des djeunes. Sérieusement ? On ne veut pas les dégouter.

      Je suis parfaitement sérieux, il y a des thèses dont les premiers chapitres sont parfois très agréables à lire, parce que ce sont des introductions beaucoup plus claires, sur certains sujets, que tout ce que l'on pourrait trouver ailleurs. Quant à encourager les articles de vulgarisation — oui, cent fois oui ! Mais pour l'instant on ne semble pas en prendre le chemin (de même que pour les bourses de thèse).

      Supprimer
  3. Bonjour,

    Point 2. Pouvez-vous précisez la course à quoi exactement ? "rester dans la course" est-il devenu votre principale motivation ?
    L'argument "liberté de le faire ou pas" me semble très faible, en pratique l'anglais risque surtout d'être imposé par ceux qui comme vous semblent obnubilés par l'idée que la compétition généralisée est la seule voie possible.

    Sur le point 1, rédiger sa thèse dans la langue que l'on maîtrise le plus me semble un gage de meilleure qualité pour le texte final qu'un anglais mal maîtrisé et au final un texte pauvre. De plus, cela pousse vers une langue unique pour la science, ce qui me semble regrettable quand on sait combien l'usage d'une langue façonne la pensée.

    RépondreSupprimer
  4. rester dans la course = avoir des résultats au meilleur niveau.

    Je ne crois pas être obnubilé par la compétition. J'ai juste conscience qu'être chercheur est une chance incroyable, que ça coûte à la collectivité, que je suis bien payé pour faire un travail que j'adore quand d'autres rament sans boulot ou avec des boulots de merde. Donc je suis conscient que je suis redevable de tout ça.

    La science se partage. On a tout à fait le droit d'écrire les plus beaux textes dans sa langue préférée. Mais pour partager les résultats, il faut que les autres puissent les comprendre - et en ce moment, en informatique, mes collègues lisent en anglais.

    RépondreSupprimer
  5. Il me semble qu'il y a une confusion entre faire de son mieux parce qu'on est payé pour ça et "attirer les meilleurs" (selon quels critères, d'ailleurs) et donc les piquer aux autres en quelque sorte. Vous parliez de fainéantise, il me semble qu'elle s'exprime aussi par le fait de chercher "les meilleurs" et donc en quelque sorte ceux qui ont le moins besoin d'être accompagné. Former les suivants m'apparaît aussi comme une mission des chercheurs, une façon d'entretenir le savoir, d'en prendre soin. Choisir "les meilleurs" pour pouvoir soi-même être parmi les meilleurs me semble donc un peu égoïste, non ?

    Enfin, les résultats et les idées ne se partagent pas forcément le mieux en nivelant le niveau de langage par le bas (ne présumons pas du niveau d'anglais tout de même), ni en excluant de fait les non-anglophones. Soit on nivèle par le bas pour que le maximum de personnes comprennent, et on appauvrit le discours et donc la pensée, soit on ne publie qu'en excellent anglais (ce dont peu sont capables) et on exclue les autres. Aucune de ces positions ne me semble la plus favorable au partage de la science.

    RépondreSupprimer
  6. J'espère ne pas vous avoir vexé ou parlant d'égoïsme, et de ce pas je précise ma pensée.

    Vous indiquez, et c'est tout à votre honneur, devoir fournir des résultats du meilleur niveau, et que pour cela il vous faut attirer les meilleurs. Mais vous avez tout d'abord utiliser l'expression "rester dans la course".

    Pour comprendre votre motivation à faire des cours en anglais, condition pour "attirer les meilleurs", j'aimerais donc savoir si c'est ce que vous percevez que l'on attend de vous: être dans la course, être le meilleur, et/ou si vous êtes vous-mêmes convaincus par cette nécessité.

    Si je vous pose cette question, c'est que j'ai du mal à comprendre l'impératif de compétition dans un domaine ou la coopération devrait primer. J'ai bien conscience des pressions appliquées à la recherche pour qu'elle soit source d'innovation et au final de PIB, mais j'aimerais savoir ce qu'en pense le chercheur: se résoud-il consciemment ou non à cet impératif ? le cautionne-t-il ? ou bien cela le choque-t-il ?

    Je ne veux pas jeter la pierre, mais comprendre comment vous en arrivez à votre point de vue.

    RépondreSupprimer
  7. Je ne suis pas vexé - j'assume...

    Mais tu touches à un sujet hyper vaste : pourquoi on est chercheur ?

    Par principe dans un slow blog, on réfléchit avant de répondre à un sujet pareil... Un prochain blog peut-être



    RépondreSupprimer