Son compteur de contacts s'est bloqué car elle n'est plus. Facebook va continuer à la proposer comme amie, dans de charmants clins d'œil de l'au-delà. On frissonne devant un de ces messages même si on sait bien que le mort n'a rien à voir avec l'indélicatesse de la proposition. Finalement, reste une occasion troublante de se souvenir.
Avec un employé pour des centaines de milliers d'utilisateurs, on comprend que Facebook ne fasse dans la dentelle. Un jour, ils s'apercevront de la disparition de Denise, sans doute parce qu'une de ses amies aura trouvé le bouton de déclaration de décès. Un contrôleur de mort vérifiera qu'il ne s'agit pas d'une mauvaise plaisanterie. Peut-être accolera-t-il alors au nom " Denise Hervieux ", une petite croix, pour elle la si peu catholique. Et ses pages Facebook deviendront un mausolée.
Facebook n'était qu'un truc de gosses. Des vieux y meurent maintenant et leurs morts compliquent la vie du réseau.
Les amies de Denise vont essayer de continuer à la faire vivre sur le Web. Mais l'issue de leur combat contre le temps ne fait aucun doute. Les comptes de celle qui vient de mourir vont être arrêtés. Ses pages sur Facebook finiront par disparaitre. Son site Web se figera. Encore quelques années et il sera fermé, entraînant avec lui dans sa mort, la mention " Webmaître Denise Hervieux ". Tous les sites où elle écrivait s'éteindront eux aussi l'un après l'autre. Ça prendra peut-être du temps, mais les marques qu'elle a laissées sur la toile s'estomperont , disparaitront. Vingt ans, cent ans, deux cents, l'infini pour le Web, et Denise finira avec Sebastian, fossilisés ensemble dans les archives du Web, sur la Wayback Machine, fosse commune des internautes disparus.