dimanche 27 février 2011

Le cassoulet siliconé de Sarkozy

Un article sur Rue89 qui dit à peu près ce que je racontai dans un vieil article. Ça prouve que nous sommes de plus en plus à penser ça?

mardi 15 février 2011

Help: Linguist needed !

Préambule : On m'a agressé sur le thème "on assiste à des trucs incroyables en Tunisie et en Egypte, qui s'appuient sur Internet, et tu n'en dis rien dans ton blog". Oui et en plus, je vais parler d'un sujet tellement mineur. Mais c'est la définition d'un slow blog : on parle de ce qu'on veut, quand on veut. Le Web et la démocratie, le sujet me passionne. Pas seulement pour ce qui est de la révolution mais surtout parce que potentiellement cela pourrait faire des citoyens qui contrôlent leurs élus, qui participent aux décisions. J'aimerais en parler... Mais une autre fois.

Prenons une science un peu particulière: La science du traitement de l'information au sens large, un peu à la Peter Denning, qui inclut des choses comme les télécoms, le traitement du signal, la bioinformatique. Comment on appelle ça ?

En anglais, ça hésite; voir en fin d'article. En Français, on a un terme excellent : Informatique, dont je comprends l'étymologie comme "science du traitement de l'information".

Mais voilà, par bêtise ou peut-être pour de sombres raisons politiques, on a un peu galvaudé le mot.

Informatique, ça fait rayon de la FNAC avec ses alignements de "livres" sur Windows et Word. Et pour citer Gérard Berry, quand on dit "tu t'y connais en informatique ?", ça sous-entend 'tu saurais réparer mon PC vérolé par un virus ?".

Bon. Si je ne me trompe, le mot mécanique peut désigner à la fois une science, la branche de la physique dont l'objet est l'étude des corps en mouvement ou à l'équilibre, mais aussi la conception voire la réparation de machine, et même un dispositif physique "la mécanique d'une horloge". On a pourtant gardé le mot mécanique pour la science. Tiens d'ailleurs la section de l'académie des sciences s'appelle Mécanique et Informatique. On y a mis les sciences avec des noms à problème?

On besoin d'un mot pour en parler. Si ce n'est informatique, c'est quoi?

Science et technologie de l'information et des télécommunications: cette appellation STIC a eu le vent en poupe pendant longtemps aux ministères et au CNRS. Au final, ça fait un peu has been car les télécoms maintenant c'est totalement de l'informatique. Et puis personne ne sait trop ce que ça veut dire.

Science de l'information: Malheureusement ce terme correspond au super étroit "Information science" = the collection, classification, storage, retrieval, and dissemination of recorded knowledge treated both as a pure and as an applied science.

Sciences du numérique (rien à voir avec analyse numérique) prôné notamment je crois par Gérard Berry, et qui est le nom de la chair du collège de France. Dans l'esprit de Gérard, c'est très large, un peu ce que je traduis moi par informatique.

Le CNRS vient de créer un institut des sciences informatiques et de leurs interactions. Si le "ique" référait déjà aux sciences, c'est un pléonasme? Ou alors c'est juste pour bien insister sur le coté scientifique. Finalement, j'aime assez ça.

Quand on me demande ce que je fais: je suis "chercheur en informatique" (et ni en computer science, STIC, sciences numériques, sciences digitales, etc.). Et maintenant je dirai que mon domaine c'est les sciences informatiques.

Informatique, j'ai choisi ton camp. :-)

Rédigé à la suite d'une question de Val Tannen (U. Penn) et d'échanges de mails avec lui et Gérard Berry (INRIA).

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En anglais, ça hésite:
  • On a le "computer science" mais "calculer" n'est qu'un bout de la lorgnette.
  • On a sa variante de computing sciences.
  • On a informatics utilisé plutôt en UK que Webster traduit par "Information science".
Il suffit de consulter la richesse des noms de départements... d'informatiques dans les pays de langue anglaise. C'est le souk! C'est que les pauvres, ils n'ont pas pensé à habiliter le mot informatics.

vendredi 11 février 2011

Fac, je te hais.

Les non-chercheurs qui liront ces lignes découvriront avec plaisir que la gestion de l'information pose aussi problème dans un institut de recherche en informatique.

De quoi parle-t-on à l'INRIA en ce moment? J'aurais tant aimé écrire qu'on parle à la cafette et dans les couloirs de trucs comme la comparaison entre les DHT et le gossiping pour la recherche d'information en pair à pair ou de la démonstration des théorèmes fondamentaux des mathématiques en COQ. Vous rêvez ! On parle :
  • des nouvelles pratiques du suivi des chercheurs.
  • de la Fac.
Le suivi du chercheur. Un large sujet ! On imagine du coaching par d'autres chercheurs, comme ça se fait ailleurs. Mais non! Il s'agit de RH et de paperasserie. La méthode proposée est bâclée, imposée dans une urgence incompréhensible, mélangée d'évaluation (merci! Ça suffit! On est déjà bien trop évalués.) J'ai bien pensé écrire un article là dessus. Mais le sujet finit par me donner la nausée (trop d'emails). Alors je vais parler de l'autre sujet, plus light.

Fac, c'est un joli nom, un diminutif sympa, tout droit sorti des 4 facultés médiévales de l'université: les arts, la théologie, le droit et la médecine. Wiktionnaire nous dit que ça vient du latin facultas, "capacité".

Mais on ne parle pas de ça à l'INRIA. Chez nous, Fac, ça veut dire " Feuille d'ACtivité ". C'est un bousin pour dire le temps que vous passez à bosser pour la communauté européenne.

En préambule, pour ceux qui ne sont pas du milieu, expliquons rapidement les projets de recherche européens. Le plus souvent avec des gens un peu partout en Europe, on monte des "consortiums", on écrit une proposition de projet. Il est évalué. S'il est accepté, on doit faire le boulot proposé avec les moyens humains promis. D'où les fameuses facs qui montrent les personnes qui ont bossé sur le projet et le temps qu'elles y ont passé. Un peu comme si quand vous faites réparer votre voiture, vous exigiez de savoir qui a travaillé dessus et quand et combien de temps. On doit aussi apporter des "déliverables" (livrables?) promis, typiquement des rapports, du logiciel, des démonstrations.

On a vu par le passé des gens abuser (surtout des industriels s'il faut faire dans la délation, plus rarement des chercheurs), "charger" des journées de travail fantaisistes et recevoir de l'argent de l'Europe sans trop faire de recherche. Donc les feuilles de temps, même si j'adore pas, je respecte. Mais la manière d'installer la FAC nouvelle mérite d'être soulignée.

Précaution: Je vais sans doute me tromper sur les détails, dire des bêtises. Je ne suis pas un expert en Fac et je ne tiens pas le devenir.

Le logiciel FacWeb est arrivé, au nom qui fleure bon les vieux campus et les nouvelles technologies. Son installation tient d'un management autoritaire totalement méprisant des chercheurs. En tous cas, c'est comme ça que le ressentent les chercheurs.

Ce qui pose problème :
  • Dans l'urgence, on nous demande de tout laisser tomber pour nous occuper de feuilles d'activité.
  • On n'arrive pas à se connecter à FacWeb de l'extérieur et quasi tous les chercheurs sur mon contrat sont à Cachan "à l'extérieur". (C'est vrai que la Fac est une information très sensible au moins confidentielle défense).
  • Puis, on se connecte mais nos comptes n'ont pas été créés
  • Ensuite ils ont été créés mais nos mots de passe ne marchent pas, etc.
Bien sûr, si vous lisez des emails fleuves, si vous passez quelques coups de fils, si vous allez suivre une formation au Parc Club, et si vous avez un bon karma, vous n'aurez aucun problème avec la Fac. Bref, si vous vous arrêtez tout ce que vous aviez prévu de faire et passez au service des services, tout ira bien. Mais juste un petit rappel pour ceux qui nous dirigent. Nous aussi, on bosse. C'est marrant, on fait de le recherche avec des deadlines, des réunions, du travail. On ne peut pas tout laisser tomber pour suivre une nouvelle procédure.

On avait le choix entre annuler notre réunion de travail de Jeudi et la remplacer par une journée Fac ou ne pas remplir les Fac du mois de Janvier. On a choisi la deuxième option. Seulement voilà, on a ensuite réalisé qu'une assistante se retrouvait à faire nos feuilles d'activité en échangeant des emails avec nous pour les compléter. Ca lui fait une surcharge de travail considérable. Marche arrière toute. On a décidé de remplir les Fac car on ne veut surtout pas rendre la vie encore plus difficile aux assistantes des services.

Alors qu'est-ce qu'on peut faire? Râler sa frustration. Ce que je fais.

C'est vrai que ça ne prend pas tellement de temps de remplir les Fac (quand tout est au point). C'est vrai que les chercheurs réagissent de manière trop épidermique quand on leur demande de faire de la paperasserie. Mais il faut comprendre qu'ils ont de plus en plus de ces petites tâches qui les empêchent de bosser. Il faut comprendre que quand un chercheur a déjà une journée super chargée, il déteste perdre une ou deux heures sur une procédure installée dans l'urgence, mal préparée, avec des outils mal adaptés, pour donner une information qui tiendrait en quelques lignes: les journées où il a bossé sur le projet machin en janvier.

Pour finir, je me suis dit que bosserai sur les Fac le weekend, mais ça, ce n'était pas possible: FacWeb ne bosse pas le weekend (sic). Il y a sans doute aussi de bonnes excuses (les logiciels qui travaillent même le weekend sont plus chers?) mais quand même c'est trop drôle.

vendredi 4 février 2011

Connaissez-vous Léo Szilàrd ?

Ce texte me parait si vrai que j'ai des doutes sur sa véracité. Même s'il est faux, merci Marie-Christine.

Léo Szilàrd (1898-1964), premier concepteur de la réaction en chaîne (dès 1933), auteur de la lettre cosignée avec Einstein pour convaincre le président Roosevelt de fabriquer la bombe A... Ce visionnaire (pour bien d'autres raisons que nous ne détaillerons pas) consacra la fin de sa vie à la défense d’un monde dénucléarisé et à l’écriture de nouvelles. Dans l’une d’elles "la voix des dauphins", un milliardaire demande au personnage principal, un chercheur, comment on pourrait ralentir l’avancée de la science, trop rapide selon lui.

Le chercheur répond : « On pourrait mettre en place une agence dotée annuellement de trente millions de dollars. Les chercheurs ayant besoin d’argent pourraient y faire des demandes, en se montrant convaincants. Comptons pour examiner les dossiers dix comités, chacun composé d’une douzaine de chercheurs. Prenons les chercheurs les plus actifs et nommons-les membres de ces comités… Premièrement, les meilleurs chercheurs seraient soustraits à leurs laboratoires et occupés à l’évaluation des dossiers. Deuxièmement, les chercheurs cherchant de l’argent se concentreraient sur des questions jugées prometteuses, et sur lesquelles ils seraient à peu près sûrs de pouvoir publier rapidement. Les premières années, il y aurait certainement une augmentation notable de la production scientifique ; mais à force de rechercher les choses évidentes, bientôt la science se tarirait… Il y aurait des modes, et ceux qui les suivraient auraient les crédits. Ceux qui ne les suivraient pas n’en auraient pas, et apprendraient rapidement à suivre les modes à leur tour. »

Léo Szilàrd, The Voice of the Dolphins, Simon et Schuster, 1961.